dimanche 23 août 2015

Le Pacha : les meilleurs répliques (par Michel Audiard).


     Comme tous les films dont les dialogues sont signés Michel Audiard, Le Pacha nous présente des répliques succulentes. En voici les meilleures.


Joss (pensant lors de l'enterrement de son ami Albert Gouvion) : - Oh, dans le fond, y'a pas de quoi pleurer ! Il revient tout simplement à Saint-Denis, Albert. Il revient après un grand tour inutile, c'est tout. Il va enfin pouvoir se reposer de toutes ses singeries, de toutes ses fatigues, chez lui, là, tout près de la Seine. Autrefois, avant que le béton vienne manger l'herbe, c'est là qu'on regardait passer les bateaux, tous les deux. On jouait à faire semblant de croire qu'ils allaient à Shanghai, les péniches, ou qu'elles passaient sous le pont de San Francisco. Et lui, Albert, il a dû continuer longtemps à faire semblant de croire. À croire des trucs, des machins. C'est peut-être bien à cause de ça qu'il est mort. De ça, et de son béguin tordu. Tout le monde parle d'infarctus, de cirrhose, de cancer, mais moi je dis que la pire maladie des hommes c'est de donner tout son amour à une seule bonne femme.

Joss : - C'est du cri de se faire engueuler par un con pareil ! Je l'ai mis en veilleuse pour ne pas envenimer les choses, mais tout de même.
[...]
Joss : - Et maintenant, parlons un peu d'Albert. Qu'est-ce qu'il lui a pris de vous balancer dans le décor ?
Marc : - Allez donc savoir...
Joss : - Eh, c'est qu'il faudra pourtant le savoir.
Marc : - Pour moi, il a eu la trouille.
Joss : - Ben, la trouille, la trouille, la trouille, j'aimerais mieux autre chose ! Un mauvais réflexe, peut-être, il a toujours conduit comme un branque. Mais le traczir, de lui... ça me surprend ...
Marc : - Ben, vous savez, se faire tirer au bazooka, ça surprend aussi.

Joss : - Celui-là, on lui fout Interpol dans les reins. Y a pas de raison qu'on soit les seuls emmerdés.

Albert : - J'ai eu les jetons, c'est tout !
Joss : - T'as vu un hérisson sur la route, ou quoi ?
Albert : - J'ai vu moi. Moi et le môme Marc, décapités par leur engin. Parce que figure-toi que je les connais, ces saloperies-là. Je les ai dégustés en 39. Et j'peux même te dire où.
Joss : - Moi aussi, dans les Ardennes. Ton char, tes Ardennes, ton repli sur la Loire, je peux tout te raconter. Mais, c'est pas la façon de conduire ton char en 39 que je critique, c'est la façon de conduire ta charrette aujourd'hui.
Albert : - J'te dis que j'ai eu les jetons. Peur, j'ai eu peur, voilà. C'est ça que tu voulais qu'je dise. T'es content ?
Joss : - Oh, je pavoise pas.
Albert : - Oh, mais si ! Oh la la, y'a longtemps que t'attendais ça. Tous d'ailleurs, vous attendiez ça, que j'me dégonfle un coup, depuis vingt ans qu'je fonces et qu'je prends du plomb dans la viande. On s'habituait.
Joss : - Vas-y, va. Récite-moi Bébert l'intrépide, j'connais pas.
Albert : - Quand on a cravaté Jo-les-grands-pieds, t'as fait un beau rapport, t'as toujours été fort en rédac. Mais tous les deux, on lui doit quelque chose au Grands-pieds, toi de l'avancement et moi six mois d'hosto. Mais ce matin, j'étais bon pour la médaille posthume, alors tu m'excuseras si j'ai quitté la piste.
Joss : - Ben dis-donc, ça t'a drôlement secoué, cet obus ! Moi, jusqu'alors, je t'avais vu te dérober qu'une fois, dans la cour du patronnage. Tu te souviens quand le petit rouquin t'a demandé de sortir et que t'es pas sortie.
Albert : - C'te bonne blague, j'sautais sa frangine.
Joss : - Et ben tu vois, t'avais une raison. Alors, t'en avais p'têt une autre, ce matin.
Albert : - Dis-donc, Louis, tu crois pas que tu pousses un peu ? Où on vas ?
Joss : - Ben j'te l'demande.
Albert : - Ah beh si c'est un interrogatoire, qu'est-ce que t'attends pour faire monter les sandwichs et de la bière ? A quoi tu penses ?
Joss : - Je pense que le jour où on mettra les cons sur orbite, t'as pas fini de tourner.

Joss : - En tout cas le revolver va au labo.
Le médecin légiste : - Je crains que le labo ne nous apprenne pas grand-chose. C'est visiblement un accident, un regrettable accident.
Joss : - La mort de Louis XVI aussi.

Marc : - Alors, on lance tout le monde là-dessus ?
Joss : - Lancer sur qui ? Sur quoi ? On va encore draguer tout le mitan, interroger dix ou vingt peaux-rouges qui nous fourniront des alibis de première confirmés par tous les charlots de Pigalle. Alors ? Mais tu vois, mon petit gars, ce coup-là, ils ont tiré une balle de trop ! Et pourtant, c'était un drôle de colis, Albert, crois-moi ! Comme copain d'enfance, c'était pas le grand Meaulnes, fallait se le faire. Il n'a jamais arrêté de m'emmerder. Il a pris son élan à la communale. Comme il avait honte de ses galoches, il fallait que je lui prête mes pompes. Il pétait une chaîne de vélo, fallait que je lui répare. Après, c'était l'algèbre : c'est du cri, j'y comprends rien, qu'il disait. Alors j'étais obligé de me farcir ses problèmes. Parce qu'il a toujours eu des problèmes ce cave, t'entends ? Toujours, toujours ! Et de pire en pire ! Mais, qu'est-ce que tu veux, c'était mon pote !

Un inspecteur : - La nuit dernière, Marcel Lurat tapait le poker chez le coréen.
Joss : - Tiens donc, ben on va aller voir ça. Quand on tue un poulet, c'est fou ce qu'il y a de parties de poker qui s'organisent chez les voyous.

Joss : - Maintenant, je vais te dire quelque chose. L'un de nous deux butte l'autre. Toi on te raccourci, moi on me félicite. J'sais bien que c'est injuste, parce que c'est injuste. Mais c'est comme ça. T'as contre toi quarante ans de bons et loyaux services et une vie exemplaire.

Joss : - Bonsoir, Ernest.
Ernest : - Bonsoir, M'sieur le divisionnaire.
Joss : - Ben dis-donc, ça a pas l'air d'aller. Moi non plus, d'ailleurs. Je viens de regarder ton dossier, c'est déprimant. Cinq piges pour l'affaire de la rue de Douai, cinq piges pour l'encaisseur de la prévoyance et cinq piges de mieux pour la fusillade de Rungis. Et pis maintenant, v'là qu'tu cabosses un vigile pour piquer des fringues qui appartiennent à l'Etat. C'est pas raisonnable. Y'a qu'un truc que je comprends pas : qu'est-ce qu'il vient faire, Brunet, là-dedans ? 
Ernest : - Brunet ?
Joss : - Oui. Ben t'as bien parlé de lui ?
Ernest : - J'l'ai p'têt mentionné, pour l'anecdote. J'me souviens, je ne me souviens pas, je...
Joss : - Oh, prends ton temps, réfléchis. A ça, y'a autre chose, parce qu'avec ton palmarès, t'es bon pour la relègue. Et en sortant, mon gros père, ce sera Bicêtre. Notes bien que tu pourras toujours raconter ta vie, le soir, sur un banc, aux p'tits vieux. M'enfin, tout de même. Ah, tu vois, moi j'la vois pas jojo, ta fin de vie.
Ernest : - Oh merde, arrêtez un peu.
Joss : - Remarque que l'essentiel, c'est de se conduire comme un homme, partir la tête haute aux Assises, parce qu'après on sait pas c'qui peut lui arriver.
Ernest : - J'voudrais vous parler, moi.
Joss : - Mais on est là pour ça.
Ernest : - Oui, mais... d'homme à homme.
Joss : - Messieurs, si vous voulez bien nous laisser. Ernest a des pudeurs.

Gainsbourg : - Écoute les orgues
Elles jouent pour toi
Il est terrible cet air là
J'espère que tu aimes
C'est assez beau non
C'est le requiem pour un con...

Marc : - Oh, Émile, c'est un mec tranquille.
Joss : - Oui, je sais, on vit dans un monde tranquille. Les peaux-rouges se flinguent entre eux tranquillement, Albert a été dessoudé tranquillement, et ton pote Émile va braquer un train postal tranquillement. Eh ben moi, tous tes pères tranquilles, j'en ai ras le fion !

Émile : - Moi, je suis pour l'ordre. J'aime que les voyous soient d'un côté et les poulagas de l'autre. Et votre pote, on ne savait plus très bien de quel côté il était. À force de fréquenter le milieu, il s'y était fait des relations. Même, en quelque sorte, de la famille. Léon de Lyon, vous en avez entendu parler ?
Joss : - Vaguement, oui !
Émile : - Vous ne saviez pas que Gouvion était maqué avec sa sœur ?
Joss : - Non, mais on est là pour apprendre.
Nathalie : - Chez nous, à partir de sept ans, si on rapportait rien à la maison, on regardait becqueter les autres. Alors ça forme le caractère. A dix-huit ans dans la famille Villars, on entrait en maison de redressement.
Joss : - Ah oui, comme dans d'autres familles on entre au séminaire ! Et ben, puisqu'on en est aux confidences de jeunesse, je vais te faire une de confidence : le Albert a toujours eu la galipette maudite. Dix fois je l'ai arraché à des volailles incroyables. Mais je croyais tout de même qu'à 60 carats il avait écrasé, et ben je m'étais gouré. Il a fallu qu'il rencontre une petite salope comme toi pour lui mettre la tête dans le sac.

Nathalie : - Oh, je me fous d'Albert !
Joss : - Et oui ! Comme moi je me fous de Léon. Mais tu crois pas qu'on a pas une bonne raison tous les deux de le faire basculer dans une trappe le petit Quinquin ?

Joss : - Oh, tu sais, quand on parle pognon, à partir d'un certain chiffre, tout le monde écoute.

Quinquin : - J'ai des envies de voyage. L'Océanie, Bora Bora, les vahinés. Tu connais ?
Nathalie : - Pourquoi ? Tu comptes m'emmener ?!
Quinquin : - On n'emmène pas des saucisses quand on va à Francfort !
Nathalie : - Tu pourrais dire une rose quand on va sur la Loire, question de termes !

Quinquin

Nathalie : - Vous aviez raison. Dès qu'on leur parle de grisbi, ça leur bloque les méninges. Ils pensent plus à autre chose. Mais pourquoi vous l'avez pas arrêté ? Je comprends pas.
Joss : - Parce que si je l'arrête, on le jugera. Et malgré ses dix crimes affichés, son avocat le posera en victime et le fera passer pour un dingue. Alors, on l'enverra dans un asile, d'où il se tirera, d'ailleurs. Et il recommencera. Et ça, je ne le veux pas.

Joss : - T'aurais pu au moins indiquer l'étage, je viens de m'en farcir trois. J'espère que le prochain rancard tu ne me le fileras pas à la Tour Eiffel.
Ernest : - Je m'attendais pas à des remerciements, mais tout de même !
Joss : - Alors, ton olympiade du hold-up, où t'en es ?
Ernest : - Je vous l'ai déjà dit : un fourgon postal, l'influence anglaise, comme dans tout, quoi !
Joss : - D'ici à ce que vous achetiez vos cagoules chez Old England, y'a pas loin !
[...]
Ernest : - Ce que je fais pour vous, je le ferais pour personne d'autre, hein.
Joss : - Dis donc Ernest, entendons-nous bien hein, t'as besoin de moi, j'ai besoin de toi, on traite, mais un casseur doublé d'une donneuse, tu voudrais tout de même pas que je t'embrasse, hein ?

Le Directeur : - Onze morts. Et d'après toi, tous de la même main. Quinquin ?
Joss : - Ouai.
Le Directeur : - Tu as des preuves ?
Joss : - Non.
Le Directeur : - Autrement dit, nous le mettons dans le trou, il en ressort le lendemain.
Joss : - Si je l'expédie dans le genre de trou dans lequel il a envoyé Albert, ça m'étonnerait qu'il en sorte !
Le Directeur : - Écoute-moi, Louis !
Joss : - Oh écoute Paul, moi, Le mitan j'en ai jusque-là ! Cela fait quarante ans que le truand me charrie. Je l'ai digéré à toutes les sauces et à toutes les modes : en costard bien taillé et en blouson noir. Ça tue, ça viole, mais ça fait rêver le bourgeois et reluire les bonnes femmes. Elles trouvent peut-être ça romantique, mais moi pas ! Alors, j'ai pris une décision. Moi, les peaux-rouges je vais plus les envoyer devant les jurés de la Seine, comme ça il n'y aura plus de non-lieu ni de remise de peine : je veux organiser la Saint Barthélémy du mitan ! Tu m'a compris ?
Le Directeur : - Bravo ! Et tu comptes sur moi pour te couvrir ?
Joss : - Sur personne ! Puis, tu sais, hein, je m'en fous, dans six mois je décroche ! Je sais que vous avez préparé les allocutions et commandé les petits fours. Alors, qu'est-ce qu'il peut m'arriver ? D'être privé de gâteaux ? Et après ?
Le Directeur : - Tu simplifies un peu !
Joss : - Bon, ben, alors, simplifions : Paul, j'ai besoin de dix gars.
Le Directeur : - Pour quand ?
Joss : - Lundi ! Tu vois, ça tombe bien, c'est le jour de la lessive !

Joss : - Tu vois, Marcel, les bastos c'est plus facile à donner qu'à recevoir ! J'suis sûr que t'avais jamais songé à ça !

Joss (pensant) : - Albert les galoches, la terreur des Ardennes, le bonheur des dames, mon pote, l'empereur des cons...

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