lundi 31 août 2015

Le cave se rebiffe : tournage et casting.



     En 1960, Jean Gabin est revenu au sommet de sa popularité. Il est devenu la grande star du cinéma français. Passé de son image de "Gueule d'amour" avant la Seconde Guerre mondiale à celle du gangster vieillissant (avec Touchez pas au grisbi, en 1954). Michel Audiard (encore lui) n'est pas étranger à ce retour au premier plan. En effet, depuis Gas-oil en 1955, Audiard lui concocte des répliques qui tuent, des dialogues gouleyants, dont les engueulades mythiques du Président, les invectives d'Archimède le clochard, les interrogatoires musclés du commissaire Maigret.

L'écriture
     Douzième collaboration entre Gabin et Audiard, Le cave se rebiffe se révèlera être sans doute le plus grand florilège de répliques "qui tuent". Gabin retrouve sur le tournage Gilles Grangier derrière la caméra, qu'il connait depuis 1936. Le cave se rebiffe est une adaptation très libre du roman éponyme d'Albert Simonin, deuxième volet des aventures de Max le menteur (le 3ème volet sera Grisbi or not grisbi, connu au cinéma comme Les Tontons flingueurs). Les dialogues du roman ont d’ailleurs été totalement réécrits, en douze jours, par Audiard pour offrir un rôle de vrai dur à Gabin. Lorsque Simonin, Audiard et Grangier présentent le scénario à Gabin, chez lui à Deauville, celui-ci accepte le rôle immédiatement. Il est tellement heureux qu'il garde même ses trois complices chez lui pendant 48 heures.

Le casting
     Lorsque Gabin, Audiard et Grangier choisissent ensemble le casting, ils ne font pas dans la dentelle. Que des stars : Bernard Blier, Maurice Biraud, Franck Villard, Robert Dalban... 
     Gabin fait également embaucher Martine Carol, à un moment difficile de sa carrière. Pourtant, cela a mal commencé. Martine Carol donne une interview à un journaliste, qui titre sur la rumeur (totalement fausse) de leur liaison passée. Lorsque Gabin met la main sur l'article, il pique une énorme colère, menaçant de faire renvoyer Martine Carol à la prochaine incartade. 
     Durant le tournage, l'actrice traverse également une période compliqué, se réfugiant dans l'alcool. Conséquences : problèmes de de mémoire et de concentration. Pendant une scène où elle donne la réplique à Gabin, Blier, Villard et Balpêtré, elle doit ouvrir une porte dans un décor qui en comporte plusieurs. Malgré les prises à répétition, elle ne parvient pas à ouvrir la bonne porte. Grangier pique une colère, alors que Gabin, riant aux larmes, la défend et lui conseille d'aller se reposer. 
     Un des personnages devait être incarné par Gabrielle Dorziat. Le rôle était même écrit pour elle, mais suite à une modification de l'histoire, Simonin et Audiard se rendirent compte que le personnage conviendrait mieux à Françoise Rosay. Le contrat de Gabrielle Dorziat étant déjà signé, c'est Gabin en personne qui la fera venir au studio pour lui annoncer que le rôle ne lui convenait plus. L'actrice, magnanime, accepta sa décision. Pour se faire pardonner, Gabin la fit embaucher dans son film suivant, Un singe en hiver.



Le tournage
     Sur le plateau, l'humeur de Gabin est badine et l'ambiance est heureuse. Gabin accumule les blagues avec Blier et taquine gentiment Frank Villard.
     Lors du tournage d'une scène, alors qu'il donne la réplique à Villard, Gabin lance tout bas qu'il a la braguette ouverte. Impossible pour Villard de rester sérieux.
     Gabin, opposa un non ferme et définitif au tournage de la scène où il rencontre Blier en Amérique du Sud, car il refuse de se hasarder sur des terres étrangères. Finalement, la scène sera tournée en Normandie, tout près de sa propriété de Deauville.

La sortie
     Lorsque Le cave se rebiffe sort en salle, la critique sera mitigée, mais le public fera un triomphe aux aventures du Dabe (le Roi en argot) et de son cave.
     Audiard confiera plus tard que ce film était un de ses préférés et qu'il adorait la scène mythique entre Jean Gabin et Françoise Rosay. Avec ce film, la côte d'Audiard va s'envoler, et il touchera 30 millions de francs par film, soit 5 millions de plus que l'année précédente et le double de trois ans plus tôt.


Voir aussi :
- Le tournage des Tontons flingueurs et la scène de la cuisine.
- Le réalisateur Georges Lautner est mort.
- Un coffret collector à l'occasion des 50 ans des Tontons Flingueurs
- Script intégrale des Tontons Flingueurs
- Anecdote : L'origine du film Ne nous fâchons pas

samedi 29 août 2015

Yann Moix prépare Podium 2, toujours avec Poelvoorde et Rouve.


     Bien sûr, vous devez vous rappeler du film Podium, avec Benoît Poelvoorde, Jean-Paul Rouve et Julie Depardieu. Cette comédie, sortie en 2004, avait fait environ 3,5 millions d'entrées en France (et 5 nominations aux César). Eh bien, le réalisateur Yann Moix s'est enfin exprimé concernant Podium 2 et a donné quelques détails dans un entretien au journal belge Le Soir.

     Yann Moix, qui s'apprête à débuter comme chroniqueur dans l'émission On n'est pas couché de Laurent Ruquier annonce "un scénario totalement original, qui sera la suite du 1." Nous retrouverons ainsi Bernard Frédéric, alias Benoît Poelvoorde, sosie de Claude François, ainsi que Couscous, sosie de Polnareff interprété par Jean-Paul Rouve. Cependant, contrairement à certaines rumeurs, le « vrai » Michel Polnareff  ne devrait pas jouer dans le film, contrairement à ce qu'affirme Le Soir. En effet, contacté par BFMTV, l'agent du chanteur, Fabien Lecoeuvre, a démenti l'information, déclarant juste avoir donné "un accord de principe" pour que le chanteur collabore avec Yann Moix. "Il n'y a eu ni interdiction, ni autorisation, nous n'avons tout simplement pas évoqué le fait que Michel Polnareff y participe en tant qu'acteur", explique-t-il.


     Yann Moix a, en outre, très récemment achevé le scénario, qui donnera plus d'importance au personnage de Couscous. Cela "ne veut pas dire qu’on verra moins Benoît (Poelvoorde) que dans le 1. Ça veut dire que le personnage de Polnareff y aura la même importance que ce que Claude François avait dans le 1. Il y aura en somme autant de Rouve que de Poelvoorde."

"Comme un chanteur malheureux..."
     
Avec un tournage prévu pour l'été 2016 et une sortie prévue courant 2017, Podium 2 fera peut-être oublier le navrant Cinéman, bide qui était, de l'aveu même de son auteur, une purge.

dimanche 23 août 2015

Le Pacha : les meilleurs répliques (par Michel Audiard).


     Comme tous les films dont les dialogues sont signés Michel Audiard, Le Pacha nous présente des répliques succulentes. En voici les meilleures.


Joss (pensant lors de l'enterrement de son ami Albert Gouvion) : - Oh, dans le fond, y'a pas de quoi pleurer ! Il revient tout simplement à Saint-Denis, Albert. Il revient après un grand tour inutile, c'est tout. Il va enfin pouvoir se reposer de toutes ses singeries, de toutes ses fatigues, chez lui, là, tout près de la Seine. Autrefois, avant que le béton vienne manger l'herbe, c'est là qu'on regardait passer les bateaux, tous les deux. On jouait à faire semblant de croire qu'ils allaient à Shanghai, les péniches, ou qu'elles passaient sous le pont de San Francisco. Et lui, Albert, il a dû continuer longtemps à faire semblant de croire. À croire des trucs, des machins. C'est peut-être bien à cause de ça qu'il est mort. De ça, et de son béguin tordu. Tout le monde parle d'infarctus, de cirrhose, de cancer, mais moi je dis que la pire maladie des hommes c'est de donner tout son amour à une seule bonne femme.

Joss : - C'est du cri de se faire engueuler par un con pareil ! Je l'ai mis en veilleuse pour ne pas envenimer les choses, mais tout de même.
[...]
Joss : - Et maintenant, parlons un peu d'Albert. Qu'est-ce qu'il lui a pris de vous balancer dans le décor ?
Marc : - Allez donc savoir...
Joss : - Eh, c'est qu'il faudra pourtant le savoir.
Marc : - Pour moi, il a eu la trouille.
Joss : - Ben, la trouille, la trouille, la trouille, j'aimerais mieux autre chose ! Un mauvais réflexe, peut-être, il a toujours conduit comme un branque. Mais le traczir, de lui... ça me surprend ...
Marc : - Ben, vous savez, se faire tirer au bazooka, ça surprend aussi.

Joss : - Celui-là, on lui fout Interpol dans les reins. Y a pas de raison qu'on soit les seuls emmerdés.

Albert : - J'ai eu les jetons, c'est tout !
Joss : - T'as vu un hérisson sur la route, ou quoi ?
Albert : - J'ai vu moi. Moi et le môme Marc, décapités par leur engin. Parce que figure-toi que je les connais, ces saloperies-là. Je les ai dégustés en 39. Et j'peux même te dire où.
Joss : - Moi aussi, dans les Ardennes. Ton char, tes Ardennes, ton repli sur la Loire, je peux tout te raconter. Mais, c'est pas la façon de conduire ton char en 39 que je critique, c'est la façon de conduire ta charrette aujourd'hui.
Albert : - J'te dis que j'ai eu les jetons. Peur, j'ai eu peur, voilà. C'est ça que tu voulais qu'je dise. T'es content ?
Joss : - Oh, je pavoise pas.
Albert : - Oh, mais si ! Oh la la, y'a longtemps que t'attendais ça. Tous d'ailleurs, vous attendiez ça, que j'me dégonfle un coup, depuis vingt ans qu'je fonces et qu'je prends du plomb dans la viande. On s'habituait.
Joss : - Vas-y, va. Récite-moi Bébert l'intrépide, j'connais pas.
Albert : - Quand on a cravaté Jo-les-grands-pieds, t'as fait un beau rapport, t'as toujours été fort en rédac. Mais tous les deux, on lui doit quelque chose au Grands-pieds, toi de l'avancement et moi six mois d'hosto. Mais ce matin, j'étais bon pour la médaille posthume, alors tu m'excuseras si j'ai quitté la piste.
Joss : - Ben dis-donc, ça t'a drôlement secoué, cet obus ! Moi, jusqu'alors, je t'avais vu te dérober qu'une fois, dans la cour du patronnage. Tu te souviens quand le petit rouquin t'a demandé de sortir et que t'es pas sortie.
Albert : - C'te bonne blague, j'sautais sa frangine.
Joss : - Et ben tu vois, t'avais une raison. Alors, t'en avais p'têt une autre, ce matin.
Albert : - Dis-donc, Louis, tu crois pas que tu pousses un peu ? Où on vas ?
Joss : - Ben j'te l'demande.
Albert : - Ah beh si c'est un interrogatoire, qu'est-ce que t'attends pour faire monter les sandwichs et de la bière ? A quoi tu penses ?
Joss : - Je pense que le jour où on mettra les cons sur orbite, t'as pas fini de tourner.

Joss : - En tout cas le revolver va au labo.
Le médecin légiste : - Je crains que le labo ne nous apprenne pas grand-chose. C'est visiblement un accident, un regrettable accident.
Joss : - La mort de Louis XVI aussi.

Marc : - Alors, on lance tout le monde là-dessus ?
Joss : - Lancer sur qui ? Sur quoi ? On va encore draguer tout le mitan, interroger dix ou vingt peaux-rouges qui nous fourniront des alibis de première confirmés par tous les charlots de Pigalle. Alors ? Mais tu vois, mon petit gars, ce coup-là, ils ont tiré une balle de trop ! Et pourtant, c'était un drôle de colis, Albert, crois-moi ! Comme copain d'enfance, c'était pas le grand Meaulnes, fallait se le faire. Il n'a jamais arrêté de m'emmerder. Il a pris son élan à la communale. Comme il avait honte de ses galoches, il fallait que je lui prête mes pompes. Il pétait une chaîne de vélo, fallait que je lui répare. Après, c'était l'algèbre : c'est du cri, j'y comprends rien, qu'il disait. Alors j'étais obligé de me farcir ses problèmes. Parce qu'il a toujours eu des problèmes ce cave, t'entends ? Toujours, toujours ! Et de pire en pire ! Mais, qu'est-ce que tu veux, c'était mon pote !

Un inspecteur : - La nuit dernière, Marcel Lurat tapait le poker chez le coréen.
Joss : - Tiens donc, ben on va aller voir ça. Quand on tue un poulet, c'est fou ce qu'il y a de parties de poker qui s'organisent chez les voyous.

Joss : - Maintenant, je vais te dire quelque chose. L'un de nous deux butte l'autre. Toi on te raccourci, moi on me félicite. J'sais bien que c'est injuste, parce que c'est injuste. Mais c'est comme ça. T'as contre toi quarante ans de bons et loyaux services et une vie exemplaire.

Joss : - Bonsoir, Ernest.
Ernest : - Bonsoir, M'sieur le divisionnaire.
Joss : - Ben dis-donc, ça a pas l'air d'aller. Moi non plus, d'ailleurs. Je viens de regarder ton dossier, c'est déprimant. Cinq piges pour l'affaire de la rue de Douai, cinq piges pour l'encaisseur de la prévoyance et cinq piges de mieux pour la fusillade de Rungis. Et pis maintenant, v'là qu'tu cabosses un vigile pour piquer des fringues qui appartiennent à l'Etat. C'est pas raisonnable. Y'a qu'un truc que je comprends pas : qu'est-ce qu'il vient faire, Brunet, là-dedans ? 
Ernest : - Brunet ?
Joss : - Oui. Ben t'as bien parlé de lui ?
Ernest : - J'l'ai p'têt mentionné, pour l'anecdote. J'me souviens, je ne me souviens pas, je...
Joss : - Oh, prends ton temps, réfléchis. A ça, y'a autre chose, parce qu'avec ton palmarès, t'es bon pour la relègue. Et en sortant, mon gros père, ce sera Bicêtre. Notes bien que tu pourras toujours raconter ta vie, le soir, sur un banc, aux p'tits vieux. M'enfin, tout de même. Ah, tu vois, moi j'la vois pas jojo, ta fin de vie.
Ernest : - Oh merde, arrêtez un peu.
Joss : - Remarque que l'essentiel, c'est de se conduire comme un homme, partir la tête haute aux Assises, parce qu'après on sait pas c'qui peut lui arriver.
Ernest : - J'voudrais vous parler, moi.
Joss : - Mais on est là pour ça.
Ernest : - Oui, mais... d'homme à homme.
Joss : - Messieurs, si vous voulez bien nous laisser. Ernest a des pudeurs.

Gainsbourg : - Écoute les orgues
Elles jouent pour toi
Il est terrible cet air là
J'espère que tu aimes
C'est assez beau non
C'est le requiem pour un con...

Marc : - Oh, Émile, c'est un mec tranquille.
Joss : - Oui, je sais, on vit dans un monde tranquille. Les peaux-rouges se flinguent entre eux tranquillement, Albert a été dessoudé tranquillement, et ton pote Émile va braquer un train postal tranquillement. Eh ben moi, tous tes pères tranquilles, j'en ai ras le fion !

Émile : - Moi, je suis pour l'ordre. J'aime que les voyous soient d'un côté et les poulagas de l'autre. Et votre pote, on ne savait plus très bien de quel côté il était. À force de fréquenter le milieu, il s'y était fait des relations. Même, en quelque sorte, de la famille. Léon de Lyon, vous en avez entendu parler ?
Joss : - Vaguement, oui !
Émile : - Vous ne saviez pas que Gouvion était maqué avec sa sœur ?
Joss : - Non, mais on est là pour apprendre.
Nathalie : - Chez nous, à partir de sept ans, si on rapportait rien à la maison, on regardait becqueter les autres. Alors ça forme le caractère. A dix-huit ans dans la famille Villars, on entrait en maison de redressement.
Joss : - Ah oui, comme dans d'autres familles on entre au séminaire ! Et ben, puisqu'on en est aux confidences de jeunesse, je vais te faire une de confidence : le Albert a toujours eu la galipette maudite. Dix fois je l'ai arraché à des volailles incroyables. Mais je croyais tout de même qu'à 60 carats il avait écrasé, et ben je m'étais gouré. Il a fallu qu'il rencontre une petite salope comme toi pour lui mettre la tête dans le sac.

Nathalie : - Oh, je me fous d'Albert !
Joss : - Et oui ! Comme moi je me fous de Léon. Mais tu crois pas qu'on a pas une bonne raison tous les deux de le faire basculer dans une trappe le petit Quinquin ?

Joss : - Oh, tu sais, quand on parle pognon, à partir d'un certain chiffre, tout le monde écoute.

Quinquin : - J'ai des envies de voyage. L'Océanie, Bora Bora, les vahinés. Tu connais ?
Nathalie : - Pourquoi ? Tu comptes m'emmener ?!
Quinquin : - On n'emmène pas des saucisses quand on va à Francfort !
Nathalie : - Tu pourrais dire une rose quand on va sur la Loire, question de termes !

Quinquin

Nathalie : - Vous aviez raison. Dès qu'on leur parle de grisbi, ça leur bloque les méninges. Ils pensent plus à autre chose. Mais pourquoi vous l'avez pas arrêté ? Je comprends pas.
Joss : - Parce que si je l'arrête, on le jugera. Et malgré ses dix crimes affichés, son avocat le posera en victime et le fera passer pour un dingue. Alors, on l'enverra dans un asile, d'où il se tirera, d'ailleurs. Et il recommencera. Et ça, je ne le veux pas.

Joss : - T'aurais pu au moins indiquer l'étage, je viens de m'en farcir trois. J'espère que le prochain rancard tu ne me le fileras pas à la Tour Eiffel.
Ernest : - Je m'attendais pas à des remerciements, mais tout de même !
Joss : - Alors, ton olympiade du hold-up, où t'en es ?
Ernest : - Je vous l'ai déjà dit : un fourgon postal, l'influence anglaise, comme dans tout, quoi !
Joss : - D'ici à ce que vous achetiez vos cagoules chez Old England, y'a pas loin !
[...]
Ernest : - Ce que je fais pour vous, je le ferais pour personne d'autre, hein.
Joss : - Dis donc Ernest, entendons-nous bien hein, t'as besoin de moi, j'ai besoin de toi, on traite, mais un casseur doublé d'une donneuse, tu voudrais tout de même pas que je t'embrasse, hein ?

Le Directeur : - Onze morts. Et d'après toi, tous de la même main. Quinquin ?
Joss : - Ouai.
Le Directeur : - Tu as des preuves ?
Joss : - Non.
Le Directeur : - Autrement dit, nous le mettons dans le trou, il en ressort le lendemain.
Joss : - Si je l'expédie dans le genre de trou dans lequel il a envoyé Albert, ça m'étonnerait qu'il en sorte !
Le Directeur : - Écoute-moi, Louis !
Joss : - Oh écoute Paul, moi, Le mitan j'en ai jusque-là ! Cela fait quarante ans que le truand me charrie. Je l'ai digéré à toutes les sauces et à toutes les modes : en costard bien taillé et en blouson noir. Ça tue, ça viole, mais ça fait rêver le bourgeois et reluire les bonnes femmes. Elles trouvent peut-être ça romantique, mais moi pas ! Alors, j'ai pris une décision. Moi, les peaux-rouges je vais plus les envoyer devant les jurés de la Seine, comme ça il n'y aura plus de non-lieu ni de remise de peine : je veux organiser la Saint Barthélémy du mitan ! Tu m'a compris ?
Le Directeur : - Bravo ! Et tu comptes sur moi pour te couvrir ?
Joss : - Sur personne ! Puis, tu sais, hein, je m'en fous, dans six mois je décroche ! Je sais que vous avez préparé les allocutions et commandé les petits fours. Alors, qu'est-ce qu'il peut m'arriver ? D'être privé de gâteaux ? Et après ?
Le Directeur : - Tu simplifies un peu !
Joss : - Bon, ben, alors, simplifions : Paul, j'ai besoin de dix gars.
Le Directeur : - Pour quand ?
Joss : - Lundi ! Tu vois, ça tombe bien, c'est le jour de la lessive !

Joss : - Tu vois, Marcel, les bastos c'est plus facile à donner qu'à recevoir ! J'suis sûr que t'avais jamais songé à ça !

Joss (pensant) : - Albert les galoches, la terreur des Ardennes, le bonheur des dames, mon pote, l'empereur des cons...

mercredi 19 août 2015

Le tournage des Tontons flingueurs et la scène de la cuisine.



     S'il y a bien un film français devenu culte, c'est bien évidemment Les Tontons flingueurs, réalisé en 1963 par Georges Lautner, sur des dialogues de Michel Audiard. Le film est en réalité une adaptation (très libre) du roman d'Albert Simonin Grisbi or not grisbi. Répliques ciselées, timing parfait, casting hors-norme, rien ne manque à ce film (qui faillit s'appeler Le terminus des prétentieux) devenu au fil du temps un monument du cinéma français. Et la scène de la cuisine en est le point culminant.

L'ambiance du tournage
Happy beurzday to you...
     Le tournage des Tontons flingueurs débute le 8 avril 1963, en région parisienne.  Cependant, en ce printemps 1963, une grève paralyse la plupart des productions cinématographiques. Si plusieurs scènes sont filmées en studio, à Epinay, les événements obligent la production à tourner l'essentiel des scènes en décors naturels. Toutes les scènes censées se dérouler dans la villa du mexicain et de sa fille Patricia vont ainsi être tournées dans une seule et même propriété de Rueil-Malmaison appartenant à la Gaumont. C'est un hôtel particulier, proche du château de Rueil-Malmaison. Acteurs et techniciens tournent pendant quarante jours dans cet hôtel particulier aujourd'hui remplacé par un parking (si ce n'est pas honteux...). Le budget est serré, le temps leur est compté, et la Gaumont, à l'exception d'Alain Poiré, doute de ce projet farfelu. Heureusement, l'ambiance est excellente, à la fois studieuse et détendue. « Il y avait une forme d'émulation entre les vedettes, confie Georges Lautner. Tout en bossant sérieusement, on s'est vraiment marré ! »

     Jean Gabin fut un temps pressenti pour tenir le rôle de Fernand Naudin. Il était cependant momentanément fâché avec Michel Audiard (depuis Mélodie en sous-sol), sans compter qu'il posa de telles exigences (il souhaitait imposer son équipe de techniciens) qu’il ne fut pas retenu. Le choix se porta un temps sur Paul Meurisse alors connu pour son rôle du Monocle, mais celui-ci déclina le rôle pour raisons de santé. Il apparaît toutefois quelques secondes dans la scène finale dans ce même rôle du Monocle. C'est finalement Lino Ventura qui héritera du rôle.
     Lino Ventura, la grande vedette, a d'abord hésité à rompre avec son image d'acteur sérieux, voire sombre, mais il se sent vite à l'aise dans la peau du "gugusse de Montauban". D'autant qu'il sympathise avec Venantino Venantini, son "porte-flingues" attitré. « Lino était de Parme, moi de Rome, se souvient ce dernier. On discutait du pays, de la bonne bouffe. Son accent m'amusait, il parlait comme les gens de chez lui, avec des 'ch' dans la voix ! » Chaque midi, l'équipe déjeune au bistrot du coin. Un moment sacré. Surtout pour Ventura, fine gueule et cordon bleu, dans le scénario comme dans la vie. « Lino adorait cuisiner, confirme Venantini. Quand le menu ne lui convenait pas, il apportait sa gamelle, à la manière d'un ouvrier de la Fiat ! »

Et … Et … Et … 50 kilos de patates, un sac de sciure de bois,
il te sortait 25 litres de 3 étoiles à l’alambic ; un vrai magicien
le Jo. Et c’est pour ça que je me permets d’intimer l’ordre à certains
salisseurs de mémoire qu’ils feraient mieux de fermer leur claque merde !
     Francis Blanche, beaucoup moins réservé, raconte des histoires drôles, verse toutes sortes de substances dans les verres des copains. L'homme est drôle, généreux, imprévisible. « Francis avait des moments de folie, de démesure, explique Claude Rich. On le voit lorsqu'il agrippe le poignet d'une jeune fille qui veut prendre des billets sur la table. Il crie : 'Touche pas au grisbi, salope !' et un reflet de mort passe dans ses yeux ! »

     Bernard Blier, également « porté sur la déconnante », selon Georges Lautner, a d'autres soucis en tête. Notamment celui de croiser le poing de Ventura. Mac Ronay, "première gâchette" chez Volfoni : « Un jour, en début de tournage, Blier est venu me voir. Il avait l'air préoccupé et m'a confié : 'Dis, donc, Mac, je le sens pas ce film, Lino est très nerveux. J'ai la trouille qu'il me file une vraie châtaigne ! Il l'a déjà fait deux fois, tu sais !' Je l'ai rassuré : 'Te bile pas, il a dû répéter !', mais cela ne l'a pas empêché d'aller voir Lino et de lui lancer en plaisantant : 'J'te préviens, j'me laisserai pas faire !' »
     Finalement, Des "châtaignes", Bernard Blier, alias Raoul Volfoni, en prendra trois. Fausses, bien sûr, mais dignes du meilleur comique de répétition. A chaque fois, il se trouve dans sa péniche-tripot. On frappe à la porte. Il ouvre. Ventura cogne. Volfoni s'écroule. Musique !

La scène de la cuisine a failli ne pas exister.
Touche pas au grisbi, salope !
     Michel Audiard trouvait la scène de la cuisine inutile et elle faillit bien ne jamais exister, mais Georges Lautner tient par-dessus tout à la scène de la beuverie au cours de laquelle les quatre hommes, nostalgiques, évoquent le milieu d'antan. "Je voulais faire référence à un passage de Key Largo, de John Huston", précise le réalisateur, Key Largo étant un film noir dans lequel on voit des gangsters accoudés à un bar évoquer avec nostalgie le bon temps de la prohibition.

     Dans l'hôtel particulier de Rueil-Malmaison, la cuisine est à peine assez grande pour accueillir une caméra (en réalité, à peu près deux mètres sur trois). Cela ne sera pas sans problème pour tourner la scène mythique. « Dans cette pièce, je n'avais aucun recul et j'étais dans l'impossibilité de faire le moindre mouvement de caméra. Contrairement à ce qu'on a pu croire, cette scène a nécessité beaucoup de concentration, plusieurs jours de tournage et surtout, aucun alcool. »
Aucun alcool ? Jean Lefebvre ne pouvais sans doute pas en dire autant, puisque la bande de farceurs lui avait joué un mauvais tour en lui préparant pour sa prise, bien évidemment sans le prévenir, une mixture explosive à le faire pleurer. Eh oui, les larmes de Lefebvre étaient authentiques... La scène devint ainsi de plus en plus réalistes ce qui explique aussi le nombre de prises de vues nécessaires à cette scène.

     Pour la petite histoire, quand Lino Ventura rentrera tard le soir des studios après le bouclage de la fameuse scène, il ne put s'empêcher de réveiller son épouse pour lui dire « On vient de tourner la scène du siècle ! » et lui raconter, totalement mort de rire, sans omettre l'anecdote du verre de Jean Lefebvre.

Voir aussi :
- Le réalisateur Georges Lautner est mort.
- Un coffret collector à l'occasion des 50 ans des Tontons Flingueurs
- Script intégrale des Tontons Flingueurs
- Anecdote : L'origine du film Ne nous fâchons pas

jeudi 13 août 2015

Une première bande-annonce pour The Hateful Eight, le prochain Tarantino.



     Cette fois, la machine est bel est bien partie. Nous savons de source sûre que le prochain Tarantino, The Hateful Eight, sortira en décembre 2015. Nous avions longtemps cru que ce film ne se ferait pas, suite à la fuite du script et la colère de Quentin Tarantino, décidant d'arrêter tout, puis finalement de continuer.  
 
     Ce sera donc le huitième film du réalisateur, et ça promet un résultat jouissif.




mardi 4 août 2015

Un nouveau Blu-ray pour le Dracula de Coppola !


     Après beaucoup de plaintes sur la qualité du Blu-ray (amas de pixels et grain mal gérés, et mauvaise syncro du son) du Dracula par Francis Ford Coppola, Sony a enfin décidé de corriger le tir en annonçant une nouvelle édition pour le 6 octobre 2015 aux États-Unis. Pour l'instant, nous n'avons pas d'information sur une édition française éventuelle...

     L'ancienne édition, sortie en 2007, était un des tout premiers Blu-ray de Sony et présentait une image digne... d'un DVD pirate.
     Cette nouvelle édition 2015 devrait pallier à ces failles puisque qu'elle sera composé d'un master 4K issu d'une nouvelle restauration, mais aussi d'une piste son en VO en Dolby Atmos soundtrack (rétrocompatible Dolby TrueHD 7.1). Le disque récupère également le commentaire audio qu'il avait enregistré pour le Laserdisc paru chez Criterion.
    Deux versions seront disponibles :
- une édition limitée qui inclura un livret de 24 pages, avec une toute nouvelle présentation du film par le réalisateur Francis Ford Coppola
- une édition standard, sans le livret 24 pages.

Bonus 
Divers bonus seront présent sur le disque :
- Reportage Reflections in Blood: Francis Ford Coppola and Bram Stoker's Dracula
- Reportage Practical Magicians : une collaboration entre Père et Fils.
- Commentaire audio de 1993 (initialement enregistré par Coppola pour pour le Laserdisc paru chez Criterion).
- Scènes supprimées
- Commentaire Audio et présentation du film par Coppola

Disponibilité
     Ce Blu-ray sera disponible le 6 octobre 2015 aux États-Unis (aucune info sur une édition française, mais celle-ci devrait suivre). S'il vous prenait l'idée de commander la version US, sachez que c'est un Blu-ray Zone A (l'Europe étant Zone B, vous ne pourrez pas le lire sur une platine Européenne). De plus, seul l'audio en Anglais sera disponible et aucun sous-titre français (uniquement Danois, Néerlandais, Finnois, Islandais, Norvégien, Suédois et Turc).